Le détournement d’un immeuble peut caractériser le délit d’abus de confiance (Cass. Crim, 13 mars 2024, n°22-83.689)

Par une remarquable décision en date du 13 mars 2024, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que « l’abus de confiance peut porter sur un bien quelconque en ce compris un immeuble« .

Jusque-là, la jurisprudence considérait que ce type de bien ne pouvait constituer un objet susceptible de remise, tel qu’entendu par le texte d’incrimination du délit de l’abus de confiance (article 314-1 du code pénal).

La Cour de cassation a procédé à une analyse téléologique en se fondant notamment sur les travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption du nouveau code pénal, pour considérer que l’abus de confiance peut porter sur des fonds, valeurs ou biens quelconques, en ce compris un immeuble, remis à titre précaire.

L’appréciation de l’élément matériel du délit d’abus de confiance est ainsi aligné sur l’appréciation des éléments constitutifs du délit d’escroquerie qui peut, depuis 2016, porter sur un bien immeuble.

De manière encore plus audacieuse, la chambre criminelle souligne que cette innovation prétorienne est applicable à des faits antérieurs dès lors que le principe de non-rétroactivité de la loi pénale ne s’étend pas à une interprétation jurisprudentielle à la condition qu’elle ne soit pas imprévisible..

Si cet arrêt permet de mettre en cohérence les régimes des délits d’abus de confiance et d’escroquerie, son application rétroactive apparaît comme une atteinte au principe de sécurité juridique et risque de faire des émules…

https://www.courdecassation.fr/decision/65f150a628057200093c3f91